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Séance de discussion : La maladie chronique et le vieillissement : le défi de la maladie d’Alzheimer (Bergman)


Séance de discussion : La maladie chronique et le vieillissement : le défi de la maladie d’Alzheimer

Conférenciers : Dr Bergman, Dr Ménard et Dr Banerjee

Présidente de la séance : Paule Lebel, M.D., M.Sc., CSPQ, FRCPC, Directrice, Centre d’expertise sur la santé des personnes âgées et des aidants (CESPA), Institut universitaire de gériatrie de Montréal; membre du Comité expert chargé du développement du plan d’action québécois sur la maladie d’Alzheimer et les maladies apparentées.

La Dre Lebel a joué le rôle de modératrice lors d’une période de questions à laquelle prenaient part trois médecins chargés de proposer des plans d’action ou de conseiller les gouvernements et les institutions concernant les prises de décision et l’élaboration de politiques en matière de soins de santé orientées vers une meilleure gestion du nombre croissant de patients atteints de la maladie d’Alzheimer.

La Dre Lebel s’est fait l’écho des idées avancées par le Dr Sube Banerjee qui mettent en relief la nécessité de poser un diagnostic précoce et ensuite de fournir sans tarder des soins et des services qui favorisent l’autonomie au fur et à mesure que la maladie évolue.

Le Dr Bergman a répondu à un intervenant qui se disait préoccupé par le fait que le modèle mis de l’avant durant son exposé ne tenait pas compte des différences qui existent quant aux services et ressources disponibles en milieux ruraux et urbains. Le Dr Bergman a admis l’existence d’une répartition inégale et qu’une avenue possible consisterait à déterminer des objectifs précis au sujet des emplacements géographiques de cliniques de la mémoire afin de favoriser un accès égal pour tous. Il a avancé qu’une rémunération supplémentaire et des incitatifs financiers devraient être offerts pour encourager les professionnels à travailler dans les régions mal desservies. Il donnait de plus à entendre que des services comme la télésanté pourraient jouer un rôle essentiel en ce qui concerne la couverture des régions rurales qui ont un accès limité aux professionnels et services de la santé. Les solutions possibles pour combler de tels écarts en matière de soins et pour parvenir à répondre aux besoins d’une population hétérogène touchée par des maladies neurodégénératives (par ex. souffrant de multiples états maladifs) pourraient être implantées au moyen de programmes pilotes qui visent à combler ces écarts et par l’intermédiaire de stratégies de mise en œuvre des services qui sont assorties d’objectifs quinquennaux ayant pour mission de satisfaire à des objectifs précis relatifs à l’amélioration des soins. Le Dr Bergman a enjoint les praticiens partageant les préoccupations de l’intervenant à formuler des commentaires.

Le Dr Banerjee a répondu à une question d’un médecin qui se disait préoccupé à l’idée qu’une stratégie qui oriente la formation de ses ressources vers le diagnostic précoce puisse échouer en matière d’intervention aux stades de la prévention. L’intervenant se demandait comment des efforts axés sur la modification du mode de vie et des comportements pouvaient contribuer aux stratégies nationales abordées. Le Dr Banerjee a affirmé que la stratégie nationale de l’Angleterre considère l’éducation publique comme un élément essentiel de son approche. La communication d’informations importantes concernant les facteurs de risques modifiables de la démence (par ex. les facteurs de risque vasculaire, la corrélation avec le diabète et l’obésité) fait partie de la stratégie. Sans cette composante, le Dr Banerjee l’accorde, n’importe quelle stratégie nationale sur la démence ne peut pleinement réussir.

Le Dr Ménard a été invité à se prononcer sur le rôle des omnipraticiens dans le diagnostic de la démence et on lui a demandé s’il est vrai qu’en France seul un spécialiste peut établir un tel diagnostic. L’intervenant a mentionné que beaucoup d’efforts sont effectués afin de permettre aux médecins de famille de diagnostiquer la maladie et de promouvoir la formation en la matière. Le
Dr Ménard a mentionné que la responsabilité du diagnostic doit être partagée. Étant donné que les tests à effectuer s’échelonnent sur deux à trois heures, cela va au-delà des responsabilités du médecin de famille et il est nécessaire de recourir aux services d’un gériatre. Par contre, la gestion pragmatique des cas doit être effectuée par l’omnipraticien, a-t-il ajouté, et chaque famille en France est tenue de désigner un omnipraticien puisque cette personne va demander à être remboursée. Il a mis en relief le rôle joué par le médecin de famille pour amorcer le processus de diagnostic, l’omnipraticien étant souvent le professionnel à qui l’on s’adresse au sujet de problèmes de mémoire et de cognition. Le défi au sein du système actuel, a expliqué le Dr Ménard, a trait au suivi des patients et à la gestion de cas. Les médecins peuvent ne pas être enclins à gérer les cas de patients atteints de démence étant donné que ces gens peuvent représenter une petite proportion de leur clientèle, mais nécessitent un apport considérable de ressources. Il a proposé d’augmenter le plafond salarial en ce qui concerne la gestion de cas; et ainsi, tous les omnipraticiens feraient le suivi d’un certain nombre de cas de démence à leurs différents stades d’évolution.

Le Dr Banerjee a ajouté que l’établissement de diagnostic de démence dans un contexte de soins primaires est complexe, car bien qu’il soit facile de poser un diagnostic de démence grave, l’établissement de diagnostic précoce représente un défi. En outre, il a donné en exemple une étude qui est arrivée à la conclusion que dans les dix dernières années, les médecins sont devenus de moins en moins confiants en leur aptitude à établir un tel diagnostic, ce qui s’accorde avec l’idée que le processus de diagnostic de la démence est perçu comme complexe et gruge-temps. Un grand nombre de médecins ressentent de l’anxiété par rapport à leur capacité à bien diagnostiquer la condition. Le Dr Banerjee a avancé que, sous une harmo- nisation différente des services et des soins, au sein de laquelle les services liés à la mémoire seraient intégrés aux clini-ques de la mémoire, une gamme plus élargie de diagnostics et de services de gestion seraient disponibles. De tels arrangements ne sont pas encore la norme, mais représentent une évolution en matière de prestation de soins de santé et il souhaite que celle-ci devienne bientôt habituelle.

Le Dr Bergman mentionne que depuis la tenue du premier Colloque canadien sur la démence en 1989, les experts canadiens ont mis l’accent sur le rôle des soins primaires en matière de détection, de diagnostic et de traitement. Il a manifesté son désaccord envers l’idée qu’un omnipraticien ne pourrait pas établir un diagnostic de démence, même si les conditions adéquates permettant d’établir le bon diagnostic étaient en place. Les omnipraticiens isolés qui ne bénéficient pas d’un réseau élargi pour appuyer le diagnostic et la gestion de la maladie peuvent avoir de la difficulté à poser un diagnostic, mais un médecin travaillant au sein d’une médecine de groupe et d’un système de soutien composé d’infirmiers et infirmières formés et doté des technologies de l’information appropriées sera en mesure de le faire, s’il ou elle possède la formation nécessaire, utilise les bons critères et a accès à des services d’aiguillage. Il a émis des réserves quant au fait de s’en remettre à des spécialistes comme les psychiatres et les neurologues, qui ne possèdent pas nécessairement l’intérêt ou la formation pour déceler la démence. Le Dr Bergman espère voir la fin de la pratique où les patients sont « abandonnés » par les omnipraticiens lorsqu’ils ont été référés aux professionnels de soins secondaires.

Le Dr Banerjee a ajouté que la situation est appelée à changer, une fois que les systèmes de soins de santé parviendront à mieux intégrer une catégorie telle qu’« omnipraticiens intéressés par une spécialisation ». Les omnipraticiens dont la formation en maladies neurodégénératives est jugée adéquate sont bien placés pour poser un tel diagnostic, mais il a ajouté qu’on en compte trop peu en ce moment au Royaume-Uni (moins de 10).