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Séance de discussion : Soins aux maladies chroniques (Liette)


Séance de discussion : Soins aux maladies chroniques

Conférenciers : Dr Kane et Dr Butler-Jones

Présidente de la séance : Liette Lapointe, Ph.D., Professeure agrégée; Directrice, Business and Management Research
Center, Faculté de gestion Desautels, Université McGill.

La Dre Lapointe, professeure universitaire dont les domaines de recherche comprennent la résistance au changement dans la sphère des technologies de l’information et l’implantation des systèmes d’information dans l’industrie des soins de santé, a présidé la séance de discussion entre le Dr Kane et le Dr Butler-Jones.

Les deux orateurs ont abordé la place occupée par les maladies chroniques dans l’utilisation des ressources affectées aux soins de santé et le fardeau que ce type de maladie représente tant pour les patients que pour la société en général. La Dre Lapointe a souligné que trois questions clés avaient été discutées par les deux conférenciers. La première porte sur la mesure dans laquelle le vieillissement est perçu comme un défi. La deuxième traite des réussites en matière de santé et de politiques qui sont considérées comme des indices de succès (p. ex. l’offre d’un traitement en comparaison avec l’offre de soins, comment évaluer adéquatement les résultats et quelle est la meilleure façon d’affecter les ressources). La dernière concerne la façon dont les professionnels de la santé offrant des soins cliniques et ceux travaillant avec les gouvernements peuvent mettre en œuvre des améliorations en ce qui a trait à la gestion du vieillissement et des maladies chroniques à un niveau systémique, et ce, en mettant en relief le rôle des technologies de l’information dans le processus.

On a interrogé le Dr Kane sur l’importance d’apporter des changements à la formation médicale afin de mieux relever les défis posés par la fragilité, l’handicap et la dépendance chez les aînés. Se fondant sur plusieurs facteurs, le Dr Kane a émis des doutes quant à la pertinence de procéder à une intervention de ce type dans les écoles de médecine. Les méthodes de formation et les matières enseignées sont généralement conservatrices et difficiles à modifier. De plus, étant donné le délai entre le moment où les changements philosophiques et pratiques seront mis en œuvre et le moment où ils se manifesteront, leur implantation aura peut-être trop tardé et l’information sera possiblement désuète. En dernier lieu, même si les stagiaires possèdent les connaissances adéquates au moment d’intégrer le milieu clinique, il est possible que leur environnement de travail soit réfractaire au changement.

Le Dr Butler-Jones a manifesté son accord, ajoutant que les changements nécessaires pour mieux gérer le fardeau que représente la maladie chronique devaient être implantés à plusieurs niveaux. Il a ajouté que cette intervention devait tenir compte des écoles médicales, particulièrement si l’on considère l’interdisciplinarité présente chez les professionnels de la santé ainsi que la mobilité et le dynamisme existants entre les milieux universitaires, cliniques et politiques. Ce sont des milieux propices aux nouvelles découvertes en recherche.

On s’est également interrogé sur l’incidence qu’aurait l’entrée de la génération du baby-boom dans le troisième âge. Étant donné l’importance démographique de cette génération, est-elle appelée à modifier en profondeur les politiques en matière de santé ? Le Dr Butler-Jones a confirmé cette ligne de pensée en rappelant que cette génération avait modifié la société à toutes les étapes de sa vie. Le Dr Kane a pour sa part remis en question cette affirmation. Il a noté que les changements que les membres de cette génération avaient permis d’instaurer avaient été motivés par la défense des droits de leurs parents. Lorsqu’ils deviendront eux-mêmes handicapés, leur capacité à défendre leurs propres intérêts afin de favoriser des changements en profondeur sera grandement diminuée.

Le Dr Kane a eu l’occasion de présenter plusieurs de ses idées concernant l’optimisation de la prestation de soins de santé dans un environnement où la prévalence des maladies chroniques augmente rapidement. Il a défendu l’élimination des consultations de suivi afin de favoriser la prestation de soins primaires lorsque l’état de santé change. Loin de considérer ceci comme une réduction du suivi, le Dr Kane a affirmé que cette pratique facilitait l’identification systémique de la maladie chronique.

Le Dr Butler-Jones a reconnu que cette approche pouvait permettre d’améliorer le suivi. Il a indiqué qu’il existait d’autres manières d’assurer le suivi qui permettaient aussi d’améliorer l’état de santé, mais qui ne prévoyaient pas de rendez-vous réguliers. Il a mentionné les conclusions d’une étude indiquant qu’un appel hebdomadaire ou toutes les deux semaines par un infir-mier réduisait grandement les visites à l’urgence et améliorait l’adhésion au traitement.

Ayant suggéré que les soins offerts en équipe sont inefficaces et ne changent pas les résultats, le Dr Kane a été interrogé à ce sujet. Il a indiqué que l’approche en équipe peut être couronnée de succès lorsque chaque membre a des responsabilités bien définies, les assume pleinement et a confiance en ses partenaires. La recherche et l’expérience clini-que indiquent cependant que les soins collaboratifs peuvent faire perdre du temps parce que certaines tâches sont réalisées plusieurs fois par différents intervenants.

Puisque plus du tiers des professionnels de la santé approchent l’âge de la retraite, on a demandé aux panélistes de donner leur avis sur la gravité de la pénurie dans l’offre de soins primaires et sur la manière de garantir l’accès des patients aux praticiens offrant ce type de soins.

Le Dr Kane a répondu que si l’importance des soins primaires n’était pas reconnue aux niveaux institutionnel, gouvernemental et sociétal, la crise provoquée par leur faible disponibilité s’aggravera. La rémunération doit être améliorée et les coûts doivent être récupérés dans le cadre d’un modèle économique tenant compte d’un moins grand nombre d’hospitalisations et de visites d’urgence. La viabilité du système de santé dépend de l’aptitude de la société à relever le défi que représente la maladie chronique et les investissements doivent viser les soins primaires plutôt que les grands hôpitaux.

Le Dr Butler-Jones a émis le souhait que davantage d’efforts soient réalisés au niveau de la formation afin d’encourager les praticiens à intégrer le domaine plutôt que de favoriser une position élitiste selon laquelle le spécialiste est le praticien modèle.